Le dernier rapport annuel de la Direction Générale du Trésor sur le contrôle des investissements étrangers en France ("IEF"), publié le 9 mai 2023, souligne que la protection des technologies et des entreprises clefs est une priorité gouvernementale dans un contexte de tensions internationales accrues.
Selon le rapport, 325 dossiers d'autorisation ont été déposés auprès de la Direction Générale du Trésor en 2022. L'activité du contrôle des IEF est donc restée stable par rapport à 2021 (328 dossiers instruits). 131 opérations d'investissements étrangers éligibles au contrôle ont été autorisées par le ministre chargé de l'économie. 70 autorisations ont été assorties de conditions afin de préserver les intérêts nationaux, c'est-à-dire l'ordre public, la sécurité publique ou les intérêts de la défense nationale. Ces conditions peuvent prendre différentes formes : assurer la continuité des activités sensibles en France, préserver les compétences et savoir-faire, réorganiser la gouvernance interne de la cible, mettre en place un système d'information adapté, etc.
La Direction Générale du Trésor veille aujourd'hui à accroître la transparence sur sa politique de contrôle des IEF, notamment en publiant un rapport annuel dont celui de 2022 est la deuxième édition. Dans le même esprit, elle a publié, le 8 septembre 2022, des lignes directrices permettant aux investisseurs de mieux comprendre la procédure.
Lorsqu'un investisseur étranger planifie une opération d'acquisition en France, il doit anticiper, d'une part, une phase d'analyse des critères d'éligibilité au contrôle des IEF (1) et, d'autre part, une phase de contrôle par l'administration du projet d'investissement pouvant durer, selon le degré de complexité du dossier, d'1 mois à 2 mois et demi (2). L'investisseur étranger qui ne respecterait pas cette réglementation s'expose à la remise en cause de son projet et à des sanctions (3).
1. Les critères d'éligibilité au contrôle des IEF
Le ministre chargé de l'économie exerce un contrôle sur un investissement étranger en France si trois critères cumulatifs sont réunis :
- la présence d'un investisseur étranger dans la chaîne de détention de l'acquéreur direct ;
- l'investissement est une prise de contrôle, ou l'acquisition de tout ou partie d'une branche d'activité, ou le franchissement du seuil de 25% des droits de vote (uniquement pour les investisseurs hors UE/EEE) d'une entité de droit français ;
- l'entité de droit français ciblée par l'investissement exerce des activités dans l'un des secteurs énumérés à l'article R. 151-3 du code monétaire et financier, susceptibles de porter atteinte à l'ordre public, la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale.
2. La procédure de contrôle des IEF
Le dossier relatif à un projet d'investissement éligible doit être déposé auprès de la Direction Générale du Trésor. L'administration dispose alors de 30 jours ouvrés maximum pour déterminer si l'investissement est soumis ou non au contrôle du ministre et, dans l'affirmative, s'il peut être autorisé sans conditions ou requiert un examen complémentaire. En cas d'examen complémentaire, l'administration dispose de 45 jours ouvrés maximum pour autoriser l'opération sans conditions ou sous conditions, ou pour la refuser.
3. Les sanctions encourues en cas de non-respect de la réglementation sur les IEF
Un investissement qui aurait été réalisé sans avoir été préalablement autorisé au titre du contrôle IEF est réputé nul (article L. 151-4 du code monétaire et financier). En cas d'absence d'autorisation, le ministre chargé de l'économie peut enjoindre à l'investisseur de régulariser la situation, en assortissant cette mesure d'une astreinte et/ou de mesures conservatoires. Le ministre peut également infliger une sanction pécuniaire. Enfin, l'investisseur encourt également des sanctions pénales.
Tout projet d'investissement étranger en France doit ainsi faire l'objet d'une analyse approfondie au regard de la réglementation sur les IEF dans le cadre de la due diligence juridique. La vigilance des acquéreurs mais aussi des vendeurs doit être renforcée lorsque l'investissement porte sur un secteur manifestement sensible, comme la défense, la sécurité ou les nouvelles technologies.
Les équipes de DWF conseillent les investisseurs nationaux et internationaux pour toutes les catégories d'actifs. Pour toute question sur les points soulevés dans cet article, veuillez contacter Bruno Richard, associé, DWF.